Faire face aux challenges de la lutte anti-globalisation

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Un communiqué de l'Internationale des Résistant(e)s à la Guerre (IRG-WRI)

L'internationale des Résistant à la Guerre - un réseau pacifiste international avec plus de 80 organisations affiliées dans plus de 40 pays - fut consterné par la violence de la police italienne contre les manifestants anti-globalisation à Gênes. Des membres de structures liées à l'IRG de plusieurs pays se sont rendus à Gênes pour protester contre les politiques qui engendrent faim et pauvreté dans de nombreuses parties du monde. Ces structures s'étaient engagées dans des formes d'actions non-violentes et beaucoup avaient organisé des formations aux actions non-violentes avant le départ des délégations ou participé, au dernier moment, aux préparations proposées par le forum social à Gênes. Ils se sont trouvés face à face à des forces de police déchaînées autorisées à laisser libre cours à la violence, au sexisme et à même à des comportements fascistes dans une tentative préméditée d'intimider tous les manifestants quelque soit leur attitude vis à vis de la violence. Certains dormaient dans les bureaux du forum social quand la police s'y est introduit, frappant toute personne sur laquelle les policiers pouvaient mettre la main. Ceux d'entre nous vivant dans l'Ouest soi-disant démocratique ont été choqués par la violence de la police à Gênes, et par la mort de Carlo Giulani.

A propos des contradictions du mouvement

La lutte contre la globalisation économique est une lutte globale contre la domination des entreprises et pour un ordre social juste. Dans cette lutte, des mouvements de l'Ouest, de l'Est et du Sud se sont unis. Pour autant, nous devons être conscient du challenge que représentent les contradictions internes au cein du mouvement, et celles auxquelles nous devons faire face au quotidien.

Ceux d'entre nous qui habitent l'Ouest bénéficient de la globalisation de l'économie, via des systèmes de redistribution sociale de plus en plus rudimentaires qui sont le résultat de lutte des travailleurs dans le passé. Ils sont destinés à récupérer quelques bénéfices issus de l'exploitation économique du Sud et de l'Est, issus des marchandises variées produites par la main d'œuvre bon marché du sud pour les consommateurs de l'ouest.

Pour ceux d'entre nous qui vivent en occident, la lutte est pour le maintien et l'expansion des systèmes de redistribution sociale, pour créer une vie en opposition à la consumérisme et aux simples valeurs matérialistes.

Pour ceux d'entre nous de l'Est et du Sud, la lutte est souvent une lutte pour la survie, une lutte contre la destruction de l'environnement lequel apporte les moyens de vivre, une lutte contre l'esclavagisme et la suppression des moyens basique de survie, une lutte pour la dignité humaine.

A propos de la militarisation

Les évènements de Gênes mettent en évidence les liens entre la globalisation économique et la militarisation. En tant que réseau dédié à la non-violence, l'IRG n'a pas d'illusions sur le point que peut atteindre les forces de police pour défendre les intérêts d'entreprises et l'ordre social existant. Si une telle brutalité manifeste fut une surprise pour beaucoup dans l'Ouest, il n'y a rien de plus commun dans de nombreux pays que de voir l'armée et des forces de police souvent militarisées mettre en place les conditions nécessaires pour une exploitation économique de la majorité dans ces sociétés, ce qui est une force motrice de la globalisation. Les " programmes d'ajustements structurels " du FMI ne s'adressent que rarement aux dépenses militaires tandis qu'ils demandent de sérieuses diminution des dépenses sociales et pour l'éducation. De plus, l'OTAN demande à ces nouveaux membres d'Europe de l'Est d'ajuster leurs équipements militaires aux standards de l'OTAN, ce qui diminuera les moyens destinés au bien-être social de ces pays. La résistance face à l'absence de droit du travail et face à la négation des besoins humains basiques rencontre souvent la violence de l'armée et de la police, et ce n'est pas une surprise si les droits de l'homme dans la plupart de ces pays sont peu ou pas appliqués.

La globalisation économique remet aussi en cause les droits des travailleurs dans l'Ouest et est utilisée de plus en plus pour justifier la dilution des systèmes de redistribution sociale. La résistance croissante se trouve face à des forces de police voire militaires de plus en plus importante et de plus en plus violentes.

La migration croissante du Sud vers l'Ouest rencontre des restrictions de passage aux frontières de plus en plus rigides afin de prévenir les mouvements de population victimes de la globalisation et de conduire à une politique d'immigration de plus en plus militarisée et de plus en plus raciste. Au même moment, les mouvements de capitaux sont de plus en plus " libéralisés " pour imposer une économie capitaliste globale.

L'Internationale des Résistants à la Guerre voit l'injustice économique, résultat de la mondialisation, comme une des causes de la guerre et des conflits armées. De ce fait, en tant que mouvement s'opposant à la guerre, nous nous devons de nous engager dans la lutte contre la globalisation économique et de joindre nos forces à celles des militants anti-mondialisation venant d'autres mouvements et d'autres contextes de lutte.

En même temps, nous appelons au mouvement anti-mondialisation d'entériner les liens entre l'injustice économique et la militarisation, des liens qui deviennent on ne peut plus évident au travers des actions de la police italienne à Gênes.

Une globalisation par la base

Tandis que nous nous opposons à la globalisation économique, nous ne nous opposons pas à la mondialisation en tant que telle. Le mouvement anti-mondialisation est un mouvement mondial de personnes, un exemple vivant de la mondialisation par la base. Dans cette mobilisation par la base, nous devons faire attention de ne pas être un miroir d'une globalisation élitiste, ce qui est on ne peut plus facile quand nos sens sont brouillés par une mass media aux mains de la mondialisation. Pourquoi la mort de Carlo Giuliani fut-elle à l'origine d'une onde de choc traversant le mouvement anti-mondialisation d'un bout à l'autre du monde ? Pourquoi la mort d'au moins quatre militants anti-mondialisation, assassinés lors des manifestations des 25 et 26 juin 2001 à Port Moresby en Papouasie Nouvelle Guinée n'eut elle pas le même écho ?

Nous devons mettre en valeur les luttes nombreuses et variées existant dans la plupart des régions du monde, lesquelles font l'union du mouvement anti-mondialisation. Et nous devons écouter les voix de ceux d'entre nous qui sont du Sud et qui n'ont pas souvent la parole, qu'on écoute rarement et qui n'ont aucune portée au travers des mass media.

Le besoin aujourd'hui pour un tel mouvement anti-globalisation est sans précédent de même qu'est sans précédent la construction de structures globales des bases qui assure une représentation globale.

A propos de la violence

Les évènements de Gênes posent de nombreuses questions et mettent en évidence certains des challenges auxquels le mouvement anti-mondialisation et le mouvement pacifiste doivent faire face. La question de la violence de certains mouvements militants - bien qu'une petite minorité - n'en est qu'une parmi d'autres. La violence d'une minorité de manifestants mais aussi d'agents provocateurs a offert une distraction permettant à la mass media de montrer des images répétées de manifestants tentant de briser des vitrines tout en négligeant les réelles issues : que les profits des mulitjnationales se font aux dépens des populations pauvres du monde et que ce qui est présenté comme une " aide " sert habituellement à promouvoir les intérêts des entreprises occidentales. De surcroît, la violence fait perdre leur moyens à ceux qui veulent manifester sans violence. Non seulement parce qu'ils se sont sentis associés à la violence de manifestants mais aussi parce qu'ils furent exposés à des réactions plus violentes de la police, laquelle a signifié que la violmence de certains manifestants justifiaient les attaques aveugles sur l'ensemble des manifestants.

L'IRG et ses organisations membres doivent engager le dialogue avec les groupes faisant la promotion de la résistance violente à la mondialisation que nous voyons comme une expression de l'impuissance et du désespoir. Les manifestations violentes attisent la spirale de la violence et conséquemment la militarisation sociale. D'une part, cette militarisation prend la forme d'un maintien de l'ordre plus dur ; d'autre part, certains groupes de manifestants se concentrent de plus en plus sur des formes cachées d'actions ou techniques dédiées à la destruction de propriété plutôt que de se concentrer sur une stratégie s'adressant aux problématiques réelles. Cette tendance ne peut que conduire à la marginalisation sociale des manifestants et offrir un prétexte au renforcement de leur dispositif sécuritaire.

Quoi qu'il en soit, la question de la violence du côté des mouvements de résistance n'est pas nouvelle : les mouvements s'opposant à la colonisation dans les années 50, 60 et 70 ont utilisé la violence et même la lutte armée dans une large mesure, et la violence est une question permanente aux côtés des mouvements sociaux. Même si l'IRG condamne cette violence, cela ne doit pas nous distraire des problématiques que ces mouvements pointent, ni de leur cause souvent justifiée. Si l'IRG condamne les actes de violence commis par des groupes militants, nous ne devons pas occulter la violence plus importante de la police à Gênes, ni la violence intrinsèque à la globalisation économique en général. C'est un drame que la violence du mouvement distraient des structures de la violence, laquelle tues bien plus de populations en niant tous moyens basique de survie sans même leur lancer une seule pierre ni tirer une seule balle.

A propos de la non-violence

L'Internationale des Résistants à la Guerre et ses membres croient que le mouvement anti-globalisation doit se réorienter vers une stratégie de non-violence - pas seulement contre la violence policière et étatique contre les manifestants mais aussi en opposition aux formes de militantismes de certains mouvements activistes, et contre la violente structurelle qui privent la majorité et protège les privilégiés.

Une stratégie de non-violence a besoin d'impliquer la construction de notre force en tant que mouvement et de développer les alternatives à la globalisation et aux règles des entreprises. Une stragégie de non-violence nécessite de faire usage du riche héritage des mouvements mondiaux de par le monde dans la préparation d'un confrontation non-violente, d'ébaucher à partir des expérience des pratiques de la non-violence par le Civil Rights Movement aux USA, du Mouvement Gandhien en Inde, du Mouvement des Sans-Terre au Brésil, du Mouvement contre l'Apartheid en Afrique du sud, parmi de nombreux autres.

En faisant la promotion de la non-violence, nous ne sommes pas naïfs. Nous savons que notre non-violence implique d'être prêts à faire face à la violence de la police et des états, de résistant non-violemment et de prévenir la violence d'une minorité de mouvements militants.

Une stratégie de non-violence implique aussi de repenser notre attention présente sur les prochains sommets de ceux aux pouvoir, un agenda mis en place par les tenants du pouvoir et non par le mouvement. Tandis que Seattle a permis d'exposer le mouvement et inspirer beaucoup de par et d'autres du monde de rejoindre le mouvement, la répétition de ces actions de Seattle à Washington, Prague, Davos, Québec, Göteborg, Gênes n'est pas une stratégie réelle si elle reste l'attention principale du mouvement, si elle ne s'accompagne pas d'actions locales. C'est une leçon que ceux d'entre nous dans l'Ouest devraient apprendre de ceux d'entre nous au Sud qui se sont engagés dans des alternatives économiques créatives dans le mouvement des Sans Terre au Brésil, dans les zones rurales en Inde et en Afrique.

Tandis que nous nous unissons dans l'opposition à la loi des entreprises et de la mondialisation, nous devons développer notre propre vision d'une économie non-violente. Nous devons admettre nos faiblesses pour ce qui est des alternatives, admettre savoir que combattre mais aussi admettre n'avoir qu'une image floue de ce pour quoi combattre. De ce fait, nous accueillons avec plaisir les essais du Forum Social Mondial de Porto Alegre au Brésil de discuter des alternatives. Une stratégie non violente contre la mondialisation nécessite d'inclure une discussion globale sur l'économie non-violente, une économie qui soit définie sur la base des besoins humains dans le respect de l'environnement et des autres êtres vivants.

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